L'ART NOUS AIDE T'IL A VIVRE ?
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PLAN: INTRODUCTIONRéponse
: rapidement oui ? Mais qu'entend-on par aide ? Le
mot apport ne serait il pas plus ouvert Par quels moyens et quel chemins l'art nous aide-t-il ? 1° L'ART THÉRAPEUTIQUE v FREUD
v SCHOPENHAUER: la vie étant souffrance, seul l'art nous affranchira de la vie et de la douleur v NIETZSCHE : l'art est un mentir pour ne pas mourir de la vérité 2°L'ART COMME REVELATEUR DE LA VIE :CHEMIN VERS LA VERITE ET LA BEAUTE v
LE
MENTIR-VRAI v
L'ART
COMME MOYEN DE CONNAISSANCE v
L'ART
COMME REVELATEUR DE L'HOMME CONCLUSIONINTRODUCTIONAvant d'essayer de répondre à la question, nous allons dans l'introduction essayer de préciser les mots qui la composent et surtout de leur donner un sens sinon exact, un peu défini et ciblé. L'ART:
pendant
longtemps, l'art a été associé à la "techne", c'est à dire
l'ensemble des procédés appliquant un savoir et permettant de produire
un résultat. Cette proximité de sens avec la technique ne nous semble
pas être de fait dans la question: il est sur que la technique et le
savoir aident dans la vie quotidienne et que rapprocher artisan et artiste
-même si cela est intéressant ne nous lancerait pas dans un café philo. C'est
donc plutôt la définition de l'art autonome, apparue à la renaissance,
qu'il faut prendre en considération ici: l'art devient alors le domaine
de la réussite individuelle, relève des activités de jeu et d'esprit.
C'est surtout une activité désintéressée et gratuite, agréable pour
elle même, n'ayant pas en vue la production utilitaire. Avant le 18ème,
l'artiste devait servir la religion ou le prince, il était
essentiellement l'expression du sacré: puis au 18ème, l'art n'a voulu
servir que l'art………. Cela
semble déjà lancer un paradoxe: si l'art est sans but, pouvons lui nous
donner le but de nous aider dans la vie. Mais l'art ne manque pas de
paradoxe! NOUS : le mot implique aussi bien l'artiste que le
spectateur amateur d'art. Il
est facilement compréhensible. En
effet, le créateur est toujours le propre spectateur de sa création. Même
s'il a des projets, une conscience, une habileté, l'artiste arrive au delà
du métier à l'inconscience et à la spontanéité. L'artiste dépossédé
de lui même semble être l'instrument d'une puissance extérieure:
on parlera selon les cas d'inspiration, possession ou
"enthousiasme" (Diderot). Au moment de la création, l'artiste
est toujours partiellement surpris de sa création .cf. "les
affres" de la création chez Baudelaire et Flaubert. Inversement
le spectateur lui aussi participe à la réalisation de l'œuvre et peut
vivre l'expérience de l'art. L'artiste n'a jamais clos une œuvre: il
provoque par là l'imagination du spectateur pour la poursuivre et
l'achever. Devenu actif, le spectateur se trouve obligé de s'inscrire
dans le processus de réalisation de l'œuvre ouverte: les œuvres d'art
permettent au spectateur de rebâtir ou de recréer le monde à sa manière,
d'en perpétuer le mystère ne répondant de façon définitive à aucune
question, mais au contraire en suscitant de nouvelles. "AIDE
T IL A VIVRE" : la fin de la question présuppose une vie humaine trop
lourde à porter: les hommes et les philosophes semblent se raccorder à
cette difficulté de vivre, depuis les croyants qui voient un réel trop
pauvres jusqu'aux nihilistes présentant la vie comme négative et foyer
de souffrance en passant par les romantiques et "leur mal de
vivre" sans compter les existentialistes qui parlaient du mal être………………. v
Si
l'on part d'une question référendum , le non va vite être éliminé. Durant un certain temps, l'art a été refusé dans le réel car " tout art se commet dans l'apparence: il n'ay a pas d'art sans artefact, sans production d'un objet accessible aux sens. Pour certains donc, le règne de l'apparence est un règne maudit, allant vers le FAUX. Il serait alors aussi classé comme inutile et aléatoire: pourquoi recréer un autre monde, même pour y chercher le vrai et le beau, alors que nous en avons déjà un, pourquoi redoubler une apparence?
Pascal est le plus grand nom à rester dans cette optique. Il déclarait : "Quelle vanité dans la peinture qui force l'admiration pour la ressemblance des objets dont on n'admire point les originaux" Pour lui, même si on trouve du réel dans l'art, il n'ay en a pas plus que dans la réalité , et selon lui pour vivre, habiter et affronter le réel, il ne reste que science et philosophie. Très rapidement en creusant cette conception peut être laissée de côté: même Platon avait senti que dans son apparente reproduction de la nature , l'art n'était là que pour nous construire une voie vers le réel et nous identifier le visage sensible du vrai. " L'art , loin d'imiter la nature, ne s'en inspire que pour la faire comprendre". La représentation focalise le regard, ajuste l'accommodation en fonction de ce qui est nécessaire à une vision claire car l'absence de toute médiation entre l'homme et le monde et aussi entre l'homme et lui-même immerge sans recul dans une vision confuse des choses "La réalité est une apparence plus trompeuse que l'apparence de l'art" Hegel Nous reprendrons cette analyse dans la 2ème parie consacré à l'aspect constructif et révélateur de l'art. D'ailleurs un janséniste Barcos l'avait bien exprimé: "peindre est un acte de plus profonde charité que de faire l'aumône" La véritable question pour moi est donc : que nous apporte l'art au quotidien? Quel est son rôle, comment se passe -t-il ? 1° L'ART THERAPEUTIQUE A) FREUDLe côté
thérapeutique de l'art a été très popularisé et élargi grâce au
travail de Freud. Ce dernier explique que l'artiste doit son activité créatrice
à des mécanismes qui s'apparentent à ceux de la production des rêves. La création est une transposition des passions sur
un plan supérieur, une sublimation. Pour Freud, la création artistique
est une façon de rester enfant,: on ne sort pas de l'enfance, devenir
adulte, c'est choisir un moyen de rester enfant. L'art nous permet d'échapper à la perversion (
l'adulte qui n'a pas renoncé à ses jouissances
de pervers polymorphe) et à la névrose(les névrosés avec leur
symptômes morbides sont prisonniers de l'enfance. Dans l'art les tendances infantiles ne sont ni
refoulées, ni satisfaites mais déplacées quant à leur but. L'artiste emporte son enfance avec lui et investit
ailleurs, en un autre lieu l'énergie inapaisée de ses désirs
infantiles: on peut sublimer aussi dans
la science, la philo… Le travail artistique est proche du travail de deuil
puisqu'il s'agit par l'art de supporter l'insupportable de sorte que la
souffrance peut devenir productive.. Même si dans la création d'une œuvre , la
fantaisie nous détourne de la réalité, ce détour devient forcément un
retour: l'art est un chemin de retour qui nous mène à la réalité et à
la vérité. Par son travail, l'artiste peut réconcilier le
principe de plaisir et le principe de réalité: l'artiste joue, rêve,
fantasme pour le VRAI. B) SCHOPENHAUER: L'ART AFFRANCHISSEMENT DE LA SOUFFRANCE Dans son ouvrage , le monde comme volonté et
comme représentation , Schopenhauer explique que la volonté est
universelle , immuable et libre. Elle s'applique à tous les phénomènes
du monde, elle est "la réalité ultime et le noyau du réel" La volonté s'exprime dans le monde par le vouloir
vivre, le désir et la sexualité. C'est une position anti cartésienne(
la volonté remplace la raison) et anti hégelienne ( la volonté remplace
l'esprit) . Une telle affirmation du vouloir vivre devrait être positive
: or il n'en est rien. Schopenhauer aboutit à la
conclusion inverse : l'homme connaît la volonté, mais la volonté
ne connaît rien, elle est libre et aveugle " la volonté qui
constitue notre être en soi est de nature simple: elle ne fait que
vouloir et ne connaît pas". Résultat: l'homme mène une vie sans fin, sans
finalité , dépourvue de toute signification. Vivre sans raison, une abîme
de souffrance vouée à la mort: même l'amour perd son sens , simple acte
générateur , il n'aboutit qu'à vouer au malheur et à la misère de
l'existence un être qui n'a pas demandé à naître. Puisque la vie est abîme de malheur, la
contemplation des choses et des idées grâce à l'art est un remède et
une consolation aux mots de l'existence. C'est une jouissance qui surmonte tourments et désirs,
elle nous réconcilie un moment avec l'essence du monde, avec la volonté. De tous les arts, seule la musique permet d'aboutir
à cet état contemplatif et absolu car elle est la plus immatérielle, la
moins liée au monde sensible. Autrement dit, elle est la plus proche du monde des
idées ( peinture architecture théatre restent attachés à la représentation
, la reproduction de la réalité) Schopenhauer conçoit ainsi une triple
identité : LE
MONDE/ LA VOLONTE/LA MUSIQUE Le monde est une musique incarnée et en même temps
une incarnation de la volonté. C° NIETZCHE:L'ART
POUR NE PAS MOURIR DE LA VERITE………….. L'art doit avant tout embellir la
vie, donc nous rendre nous- même tolérables aux autres: de plus l'art
doit dissimuler ou réinterpréter tout ce qui est laid, ces choses pénibles,
épouvantables et dégoûtantes ……………" Nietzche a
une
vision nihiliste des choses: il conteste la vision rationalisante et
consolatrice d'un cosmos ordonné dont les lois seraient régulatrices y
compris de notre âme. Il récuse Apollon au profit de Dyonisos, répudie
le cosmos au profit du chaos, dénie à la raison sa souveraineté usurpée
au profit du délire: mais il donne son entier consentement aux activités
artistiques et aux œuvres d'art. L'art est érigé par Nietzsche en organon de la
philosophie, placé en son centre. C'est en lui et à partir de lui qu'il déchiffre le
monde. L'art a le génie de mentir et de permettre à la vérité de"
s'avancer masquée". Pour lui, rien n'est plus dangereux que la vérité,
car la vérité ultime de l'être, c'est le néant. L'art est le subtil
mensonge qui met l'homme à l'abri d'un dévoilement de l'être, de sa désespérante
nudité et de son insignifiante gratuité. Impossibilité de Dieu, négation
de l'histoire (Hegel.) L'homme est seul, il a à exister héroïquement. La
vérité le tue: c'est pourquoi l'instinct de vie le pousse à bâtir des
mirages dont l'illusion édifie sa puissance. Car il n'y a que cela: la
puissance de l'homme qui organise l'informe et le chaos dans un style, une
expression. "L'art est la plus haute tâche et l'activité
métaphysique par excellence de cette vie parce qu'il la sauve, il lui
permet de se survivre à elle même, de ne pas mourir de sa propre vérité,
de son néant. L'art vient remplir la béance de son existence, lui donner
des buts régulateurs et ordonnateurs. "seule vie possible: dans l'art. Autrement on
se détache de la vie." "L'art naît comme un remède à la
connaissance . La vie n'est possible que grâce à des illusions
d'art" "
L'existence et le monde ne se justifient qu'en tant que phénomènes esthétiques." L'artiste n'est donc ni un doué ni un inspiré: il
se définit par l'énergie avec laquelle il produit des choses de qualité
et par la sévérité des jugements qu'il porte à son travail: l'art développe
passion et goût , il revigore l'activité créatrice de la vie. 2) L'ART REVELATEUR ET CONSTRUCTEUR DE L'HUMAIN.
A°
LE "MENTIR-VRAI"
Tout art se commet donc en apparence pour nous amener à la vérité "L'art est la magie délivrée du mensonge d'être
vrai" ADORNO Nous l'avions déjà exprimé dans l'introduction:
l'art est un mensonge au service de la vérité "vivifiante", on
peut pour exprimer ce paradoxe reprendre le titre d'une des dernières œuvres
d'Aragon: le "mentir-vrai" L'art prend le détour de l'apparence , crée un
monde pour en même temps révéler une vérité. Le vrai est
paradoxalement rendu présent sur le mode de l'absence, 'étant indiqué
par l'œuvre, capable d'induire ,par l'émotion esthétique que procure la
vraie beauté, une démarche réfléchissante". Pour déceler le "vrai" au delà du
"mentir", il est donc nécessaire d'interpréter l'œuvre, de la
laisser retentir en nous afin d'y réfléchir et de la réfléchir. La démarche de l'art n'est que le reflet de la
complexité de l'existence et du cosmos. Il est une suite de démarches
vers la révélation, le dévoilement du réel. " Le réel seul est beau"
Alain B°
L'ART COMME MOYEN DE CONNAISSANCE (PLOTIN/HEGEL) Pour Plotin,
l'art possède une sagesse qui contient le modèle qu'il imite. Il possède
une science qui atteint directement les êtres ou plutôt un savoir total,
intuitif, qu'il croit supérieur à ce que nous énonçons dans la
discursivité du langage. "Les choses doivent se saisir d'un seul coup et
non par un raisonnement ou une délibération" La vision par l'intelligence conduit à la
connaissance du réel, non pas par la pensée mais par cette sorte de contact,
de toucher, ineffable qui existe avant la naissance de l'intelligence;
"toucher n'est pas penser." Ce mode de relation cognitif est supérieur
à la connaissance rationnelle discursive. L'art est un point de départ pour une expérience métaphysique,
une initiation au contact recherché avec l'intelligence du monde que l'œuvre
a pour mission de refléter. A la différence des images de la tradition grecque,
classique ou hellénistique qui fixent les résultats d'une analyse
rationnelle de l'objet figuré, Plotin reconnaît dans l'art ,
contemplation de l'intelligible- l'expression d'une connaissance totale et
immédiate de l'essence des choses, de l'âme universelle. Plotin a donc senti très tôt l'œuvre comme une réalité
sensible et non une réalité conceptuelle. Il anticipe un peu la
philosophie de Hegel
qui
approfondira la réalité à la fois sensible et matérielle de l'œuvre
d'art: la réalité artistique est habitée par une réalité d'une autre
nature. Il s'agit là du rapport de contemplation opposé au
rapport de consommation. Le besoin auquel répond l'œuvre d'art: servir de
pont entre l'homme ( l'esprit) et le monde (la matière). L'art arrive à faire la croisée entre le sensible
et l'intelligible. Boileau , dans l'art poétique, déclarait la
sensibilité comme une condition nécessaire à l'exercice de la raison,
à laquelle on ne reconnaît aucune indépendance par rapport à la
sensibilité. C'est ce qu'affirmeront ensuite des philosophes de l'esthétique,
définissant l'art comme " connaissance sensible": une
connaissance autonome qui s'oppose à la connaissance par concepts. Cette définition me paraît beaucoup plus
satisfaisante que celle donnée au début: l'art n'est pas pour l'art, il
n'est pas non plus destiné à des objectifs bas mais c'est un moyen de
connaissance, ainsi il a forcément un rôle dans le bien-être et l'évolution
de l'homme; ainsi il dépasse l'individuel. "L'œuvre d'art est réussie lorsqu'elle est
expressive, c'est à dire capable d'induire chez celui qui la contemple
des impressions capables de lui révéler sensiblement le visage
fondamental des choses" " Comme la religion, l'art est révélation ,
suggestion de l'invisible dans la chair du monde"
M Henry " L'œuvre d'art
parle à notre sensibilité un langage direct, immédiat: elle est
ce langage direct" Hegel 3° L'ART REVELATEUR HUMAIN (romantiques/Bergson) v
Les
romantiques et les artistes maudits……. L'artiste en se détournant
de la "réalité" et en investissant dans l'art se désintéresse
de la possession des richesses de ce monde. L'artiste crée un monde
propre dans lequel les lois ne sont pas imposées objectivement mais édictées
dans la liberté. " Le poète, après
un long, immense et raisonné dérèglement de tous ses sens, se fait
"voyant" (Rimbaud) Il y a dans l'art un
courage qu'il n'y a pas dans la réalité (// Nietzche) : le courage de
larguer toutes les amarres pour
des mondes inconnus qui peuvent être dangereux et destructeurs (cf. Le bâteau
ivre) L'artiste est celui qui a
le courage de partir d'un monde contraignant et de nous dire de loin ce
que nous aurions vu si nous en avions eu le courage. L'artiste jouit d'une
liberté absolue; l'intérêt est écarté au profit du seul souci
du beau. L'art est une libération
face à l'utile qui nous obsède et nous assiège en ce monde. v
Au delà de l'opposition avec la réalité: Bergson L'opposition art /réalité ne vaut que si l'on définit la réalité comme le règne de l'efficace et de l'utile. Or l'art nous révèle ce que la réalité n'a pas pour vocation de donner d'elle même . Il nous permet de retrouver le monde, la réalité profonde des choses. Il y a dans l'art une manifestation de ce qu'est le monde, de ce qu'est l'homme. L'art est la réalité que nous cherchons. Dans"
le rire" , Bergson déclare: "L'art n'a d'autre objet que d'écarter
ce qui nous masque la réalité pour nous mettre face à la réalité elle
même" Il
y a donc un lien profond entre l'art et l'intuition du monde: intuition
rapprochée d'une expérience spirituelle privilégiée, vision de l'unité
des phénomènes ou encore communion avec l'ordre du monde. Chez
les artistes, il y a une sensibilité plus détachée des exigences et des
choses . Pour le commun des mortels, l'individualité des choses et des êtres
lui échappe chaque fois qu'il n'est pas matériellement utile de les
apercevoir" L'œuvre
apparaît ainsi comme le médium propre à faire partager l'expérience du
réel: la révélation intérieure peut être séparée de la révélation
extérieure. v
Michel
Henry:une vision constructive de l'art et de la vie Michel henry constate bien sur que la vie est une épreuve , mais surtout une épreuve de soi, et donc une "immédiation pathétique" Plus
proche des existentialistes que des nihilistes , il constatera que "
c'est parce que la vie est épreuve de soi qu'elle peut être
accroissement de soi' (in L'invisible) Enfin, il
résoudra le problème du rôle de l'art dans la certitude de la dernière
phrase "l'art est la résurrection de la vie éternelle" CONCLUSION
L'art n'a donc pas pour mission plate d'imiter ou de copier la nature ou la réalité. Langage spécifique, il transfigure la réalité, la spiritualise et constitue un monde en soi, une réalité autonome dont la forme exprime complètement la signification. Il travaille toujours à modifier et à enrichir notre façon de percevoir et de ressentir le monde. Comme
activité, l'art est original et exemplaire; il constitue une forme
originale de connaissance non intellectuelle, un pouvoir créateur de
signification, une connaissance sensible. Il
y a bel et bien une réalité de l'art, plus réelle que la réalité et
qui nous ouvre un monde dont les frontières sont reculées. L'art est la
rencontre entre la sensibilité de l'artiste et celle de tous les hommes. En
rupture avec toute valeur d'usage, l'art nous fait pénétrer dans le
royaume des fins, qui est la gratuité totale et désintéressée de l'être. Par
la purification des sens , la dématérialisation du désir que la beauté
inspire, l'expérience esthétique nous fait parvenir à l'expérience
supra sensible. Le
beau devient symbole du bien, manifestant un ordre inconnaissable en soi,
mais exprimé par la plus haute vocation humaine. L'art
ne remplit pas seulement des fonctions magiques ( se rassurer, donner du
sens à la vie) psychologiques (s'évader du réel) ou esthétiques (
toucher au beau)ou thérapeutiques (échapper à la souffrance) il renvoie
surtout à un besoin de
spiritualité, d'expression, à une quête du sens contre la mort et le néant. Comme
le dit Malraux, "l'art est un anti-destin" par lequel l'homme
peut résister et lutter contre l'impermanence des choses. Si
notre époque fait peut être le deuil du sacré, de la vérité, elle ne
saurait faire le deuil du beau et de l'art, compagnons dune vie vouée
sinon au non sens et à l'absurde |